Messieurs, Celui qui nous quitte n'eut jamais le goût des pompeuses mises en scène. Sa mémoire s'offenserait ici de paroles apportées. Elle portera doucement, j'en suis sûr, ce qui coulera du cœur sur une tombe entrouverte. Tout ce qui est vrai, simple, naturel, Delbrouck l'aimait ; on peut dire que cela seulement il le comprenait. Parlons donc selon ses penchants et ses goûts, de cette âme ouverte et tendre, de ce cœur héroïque et fermé. Quelle ne fut pas la modestie de l'honnête homme, du vigoureux citoyen que nous pleurons ! Ses plus intimes amis ne savent qu'en partie et par bribes dérobées la succession des dévouements qui occupaient ses jours. Sa vie en est pleine et déborde. Chaque fois qu'on y puisait un fait, on recevait comme un coup de morale transcendante, qui vous courbait sous l'exemple d'un magistral oubli de soi-même. De tous ses actes, le bien surgit et vainement on cherche l'auteur qui s'est dissimulé dans un bienfait suivant. Il passe à travers ses généreuses donations comme une cause impersonnelle. On peut dire de Delbrouck qu'il ne connut littéralement pas le mot ; je. Il sut vivre sans en avoir jamais besoin. Et pourtant je me trompe ! Un trait particulier de sa forte nature le portait à s'offrir en garant chaque fois qu'il rencontrait un défaillant sur sa route. Alors il se montrait, se nommait d'autant plus que le danger était grand. Les considérations qui font chez nous la prudence, les raisons qu'on appelle la sagesse, les précautions qui nous donnent la mesure de l'obstacle et nous arrêtent, n'étaient chez lui que des excitants. Il ne se posait qu'une question : est-ce bien ? Si oui, il agissait. Disons mieux, il ne s'interrogeait pas. Il devinait, et faisait, faisait toujours, gagnant ainsi le temps des hésitations et des retours sur soi-même. Ce fut là vraisemblablement le secret de ses innombrables et bienfaisantes interventions extérieures qu'il sut joindre aux devoirs d'une vie chargée de labeurs impérieux. Quiconque l'avoisina quelque peu dans sa vie s'appuya sur lui, ou fut servi par lui sans le savoir. Tôt ou tard, de quelque position que l'on fut, on devenait son débiteur.
Louis Joseph DELBROUCK Un homme de rare vertu, Louis Joseph Delbrouck, architecte, est mort à Versailles à l'âge de 51 ans. Un ardent amour du devoir et de la patrie l'a mis au premier rang de tous les dangers traversés par les parisiens depuis un an. Il a donné toutes ses forces. L'épuisement l'a tué. Il laisse sans fortune deux jeunes filles, dont l'une est en bas âge. Des amis et des confrères ont songé à créer quelques ressources aux jeunes enfants du défunt. Ils publient ici les paroles qui ont été prononcées sur la tombe de Delbrouck par Emile Trélat, son ami. Brochure de 16 pages conservée à la B.N. (Ln 2726210) - Paris - Imprimerie de E ; Martinet, Rue Mignon 2) Puisse l'homme de cœur qu'ils pleurent être assez apprécié des artistes, et les sympathies s'unir autour de sa mémoire assez vives et nombreuses pour que leur but soit atteint.
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