C'est ainsi que le député républicain du Mans, Alexandre Ledru-Rollin déclara, à l'adresse du roi, lors d'un débat à la Chambre en 1847 : " … Si nos industries, notre commerce, notre crédit financier, sont dans un état alarmant de souffrance, je pourrais dire de ruine imminente, à qui la faute ? A qui imputer la responsabilité ? Au système qui pèse si lourdement depuis seize ans ! C'est vraiment que pour se défendre, il invoque comme cause de cette détresse, un accident calamiteux, mais passager : le peu d'abondance des céréales. A la veille de 1789, pour masquer d'autres plans, couvrir d'autres désordres, on l'invoquait aussi. Ce n'est là que la dernière goutte qui fait déborder le vase déjà trop plein. La détresse des classes ouvrières, le malaise des commerçants, le manque de numéraire tiennent à des causes plus générales, fondamentales, permanentes …Encore un coup, au lieu d'attendre des réformes d'un pareil régime, ce qu'il faudrait faire avant tout, c'est de cesser de le défendre et de le réformer lui-même… " A toutes ses difficultés vint s'ajouter un sérieux mécontentement politique dont l'origine émanait de l'immobilisme du gouvernement Guizot face à la réforme électorale, la question sociale, la popularité chancelante de la famille royale et le manque d'envergure de la politique étrangère. C'était donc toute une conjonction de faits et de contestations qui accusèrent le régime en place. Il ne manqua que l'événement déclencheur de la révolution … il survint avec l'interdiction d'un banquet républicain à Paris organisé à l'initiative de quelques radicaux du XII ème arrondissement. Les organisateurs passèrent outre l'accord du gouvernement qui réaffirma encore son interdiction le 19 février 1848 … Alors, tous ces ingrédients conduisirent inévitablement à l'insurrection du peuple … Le 24 février, vers midi le roi abdiqua en faveur de son petit-fils, âgé de neuf ans ; la duchesse d'Orléans fut nommée régente. Elle se rendit à la Chambre pour faire accepter sa régence, mais se pressaient là des gardes nationaux, des députés et des gens du peuple. Puis peu à peu la foule envahit la Chambre et les derniers espoirs de la monarchie furent anéantis. La confusion règnait ! A la tribune Lamartine tenta de se faire entendre pour proposer différentes personnes en vue de faire partie d'un gouvernement provisoire. Au milieu de ce tumulte des voix s'élevèrent pour demander la proclamation de la République. La fin de la monarchie fut sans gloire, les derniers membres de la famille royale et la duchesse d'Orléans quittèrent Paris et la France pour gagner leur exil en Angleterre. Nombreux furent les contemporains à juger que l'insurrection tenait à l'absence de réaction du roi Louis Philippe. Ainsi, le 24 février un décret proclama la république, sous réserve de ratification par le peuple. Un gouvernement provisoire de onze membres fut constitué. Le 25 février fut proclamé le droit au travail, la suppression de la peine de mort en matière politique. Le 27 février, les Ateliers nationaux pour la chômeurs furent institués. Début mars la liberté d'expression revint pour la presse, les clubs et le théâtre. Le 5 fut proclamé le suffrage universel … puis d'autres événements se succèdèrent jusqu'au printemps et du 23 au 26 juin une nouvelle insurrection à Paris se traduisait par cinq mille six cent morts, onze mille arrestations et quatre mille déportations. Cette période était un grand tournant de notre histoire, comme l'écrivait Lamennais le 21 septembre 1848 dans sa correspondance au baron de Vitrolles : " Nous touchons à une crise, tous les partis se remuent, et l'imbécile gouvernement que nous avons depuis quelques mois, n'a de force d'aucune sorte. On ne se cache plus d'aucun côté, et chacun agit au grand jour, tout le monde, aujourd'hui voit et sait tout ce que je savais et voyais, et qui, pour l'avoir annoncé, m'a valu tant de colères. La scéne s'ouvrira pour Louis Bonaparte. Les légitimistes lui disent " Monsieur, passez devant ! " Ils ont fait l'appoint se son élection à Paris et, par un calcul assez raisonnable du reste, marquent après lui la place de leur candidat Mais, aveugles par des passions, des désirs républicains aveugles aussi souvent mais dépositaires de germes de l'avenir, et invincibles par le sentiment qu'ils ont de sa puissance, qui domine toutes les autres. Il y aura entre ces aveugles un grand combat, un combat à mort, cette mêlée effroyable dont je vous parlais et que j'aurais voulu prévenir. Nul n'y peut rien désormais, et dans la période de destruction qui s'ouvre, il faudra que chacun accomplisse son destin. Ce sera, dans la vie de la société, quelque chose de semblable à ces époques géologiques où, sur la surface bouleversée de la terre de vastes continents s'affaissent et d'autres surgissent, travail gigantesque de la nature, dont le terme est un monde nouveau.
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