En Meuse, l'eau est partout présente et le département possède encore de nombreuses fontaines et lavoirs, mais c'est surtout à partir de la Révolution Française que la construction des lavoirs s'est développée. En effet, à partir de cette époque les municipalités sont devenues responsables de la distribution de l'eau. Le lavoir était un lieu important d'une commune et il jouait un rôle domestique et social indéniable. S'était un lieu réservé aux femmes car de mémoire on n'a jamais vu d'hommes y laver du linge ! Il servait de lieu collectif d'échanges et bien souvent aussi de commérages ; on y apprenait ce qui pouvait se passer au village. Il faut le dire, parfois encore un peu un endroit de médisances. Mais surtout le lavoir était un édifice communal domestique dans lequel les laveuses se donnaient de la peine. On les voyait, agenouillées dans leur carrosse en bois dont le fond était à peine protégés par un coussin de paille ou parfois de plume. J'ai mémoire que deux ou trois femmes âgées du village remplissaient leur coussin, fait d'une simple toile de jute récupérée dans un sac agricole, d'un tas de vieux journaux froissés qu'elles venaient chercher dans les invendus du dépôt de journaux de ma grande tante. Sur le rebord en pente du bassin, elles maniaient la brosse à chiendent avec une énergie sans pareil sur les grands draps épais qu'elles décrassaient après les avoir savonnés de leur gros cube de savon de Marseille. Ensuite, elles plongeaient leur linge en le retournant en tous sens dans le réservoir alimenté d'un bout par la conduite arrivant de la prise d'eau directe de la rivière. La vanne d'évacuation en face permettait non seulement de stabiliser le niveau du bassin mais aussi d'évacuer l'eau devenue savonneuse qui repartait sans aucun filtrage directement dans la rivière, au grand damne de pêcheurs qui râlaient parfois. L'eau du bassin se trouvait donc sans cesse renouvelée et la rivière un peu plus polluée, mais qui à cette époque s'en préoccupait beaucoup ? Comme le lavoir se trouvait le long de la rivière, en bas du village, un petit sentier en pente raide permettait d'atteindre le centre du village. Les laveuses après leurs efforts physiques devaient encore remonter sur une brouette bien souvent tout leur attirail. La charge était encore un peu alourdie par le poids des linges mouillés car ils n'étaient que sommairement essorés. Comme notre maison se trouvait en haut de ce petit chemin, bien souvent les laveuses s'arrêtaient sous les fenêtres de ma grand mère pour se reprendre un peu, mais aussi le plus souvent pour poursuivre leur bavardage. Ma grand mère arrêtait sa couture pour les écouter et c'est ainsi qu'elle apprenait avant les autres habitants du village presque toutes les nouvelles qui venaient de se colporter au lavoir communal ! Ah, si le lavoir pouvait parler, il en aurait des confidences à nous faire … Combien d'intrigues ont du voir le jour dans ce lieu public ? A peine soixante quinze années se seront écoulées depuis la construction du premier lavoir que la commune vendra la pâtis sur lequel il avait été construit. Se posera alors le problème du déplacement du lavoir qui se traduira par l'érection d'un second lavoir. Le 12 janvier 1882, le maire expose que " … par suite de la vente du pâtis à la filature, le lavoir communal doit être déplacé et qu'une enquête de commodo et incommodo est nécessaire pour en déterminer le nouvel emplacement … "
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